Jim Wallis est un homme hors du commun. Alors que la guerre froide faisait rage et que les armes atomiques fleurissaient un peu partout aux USA et dans l’ex bloc de l’Est , quelques amis de Sojourners alors naissant, dont Jim Wallis, se sont opposés physiquement par des actes de désobéissance civile à une politique délibérément éloignée de la cause de la paix dans le monde et des valeurs évangéliques . Quelle audace alors, dans cette Amérique « chrétienne » conquérante et sans trop de problème de conscience !
Aujourd’hui encore, Sojourners reste un maillon écouté contre la violence, la pauvreté et les injustices récurrentes de la vie politique américaine.
La récente allocution de Jim Wallis est enracinée dans les profondeurs de l’Evangile.
Alors que l’Amérique et la France entrent dans une période électorale majeure, les chrétiens français ne devraient-ils pas être les premiers à demander à leurs élus et futurs élus politiques la justice pour les plus pauvres et que l’intégrité soit au coeur des préoccupations de nos politiciens?
Richard Vandenbroucque Decembre 2006
Traduction de Gérard Gelbart
Je m’appelle Jim Wallis, auteur de « God’s Politics » (La politique selon Dieu).J’ai été étonné de ce que Harry Reid, Sénateur, représentant du parti Démocratique, a annoncé, et je lui en suis reconnaissant. Son parti amorce en effet une ouverture en donnant un nouveau ton ; il a invité, pour la première fois un représentant religieux, sans étiquette politique, à prendre la parole au cours de son programme radiophonique, sur les valeurs qui peuvent unir les Américains en cette période critique.
Je veux donc être bien clair, je ne parle pas au nom du parti Démocratique, mais en tant que croyant, qui ressent la soif de l’Amérique pour une nouvelle vision de notre vie commune, et qui voient l’opportunité de mettre en œuvre les meilleurs de nos valeurs morales, face aux problèmes urgents qu’il nous faut résoudre. Je ne suis ni un élu, ni un politicien, mais un responsable religieux qui croit que de véritables solutions transcendent les clivages politiques. Pendant trop longtemps, nous avons vécu une politique de culpabilité et de peur, alors que l’Amérique se languit d’une politique de solutions et d’espoir. Il est temps de trouver un terrain commun pour atteindre un plus haut niveau.
Parce que nous avons perdu notre engagement envers le bien commun, la politique est sur le point de perdre pied, face à la crise la plus profonde de notre temps. De véritables solutions vont requérir le meilleur de nos pensées et de notre capacité à dialoguer, mais nous appellent également à des changements et des bouleversements intérieurs.
La plupart des Américains savent que les problèmes cruciaux, auxquels nous devons faire face, ont un caractère profondément éthique. C’est le rôle des communautés de croyants, de nous rappeler ce fait. Mais la religion n’a pas le monopole de la morale. Nous avons besoin d’un discours politique nouveau qui soit centré sur une morale qui accueille chacun de nous autour de la table.
Un gouvernement qui travaille pour le bien commun est primordial. Il y a un désir croissant pour l’intégrité de notre gouvernement d’un bout à l’autre du spectre politique. La corruption au sein du gouvernement viole nos principes les plus fondamentaux. L’argent et le pouvoir pervertissent nos décisions politiques et même nos élections. Nous devons retrouver la confiance dans notre gouvernement et réclamer l’intégrité de notre système démocratique.
A ce moment de notre histoire, nous avons besoin d’une nouvelle direction.
Le fait de laisser sur la touche ou de ne pas prendre en compte certains a toujours été d’ordre religieux et moral. Dans les Ecritures Hébraïques, la santé d’une société était mesurée à l’aulne des traitements que recevaient les plus faibles et les plus vulnérables, et la prospérité était partagée par tous. Jésus a proclamé un évangile qui était « une bonne nouvelle pour les pauvres. »
Je suis Chrétien évangélique, et un engagement auprès des « plus petits » est au centre de ma foi et me pousse à l’action publique. Il est grand temps d’engager des politiques pragmatiques et des pratiques efficaces qui « redonnent au travail sa dignité» pour les foyers aux revenus faibles et réduisent le gouffre qui s’est creusé entre les plus riches et les plus pauvres. Nous devons trouver une nouvelle volonté morale et politique pour surmonter la pauvreté et rassembler la responsabilité personnelle et collective vers un engagement à soutenir les familles courageuses.
Pour répondre à cet appel des pauvres à les sortir de leur pauvreté, il va falloir un engagement spirituel et une direction politique bipolaire. Depuis les élections, j’ai parlé à des dirigeants des deux partis, et je les ai engagés à créer un calendrier au Congrès qui s’engage pour lutter réellement contre la pauvreté. Nous avons besoin d’une alliance concrète entre les Libéraux et les Conservateurs afin de mettre au point des stratégies nouvelles et efficaces.
Cette semaine, le Président Bush a rencontré le Premier Ministre d’Iraq, M. Maliki, en vue de trouver des solutions à la crise qui déchire cette nation et ne fait qu’empirer de plus en plus vite, sur fond de guerre civile. Près de 3000 Américains et des centaines de milliers d’Iraquiens sont morts. Le coût et les conséquences de cette guerre désastreuse suscitent des questions éthiques que notre nation doit affronter. Des dirigeants des deux partis reconnaissent que la seule issue morale et pratique est de changer d’option quant à la politique Américaine, en commençant par un débat national honnête sur la meilleur façon d’opérer le retrait des forces armées américaines d’Iraq avec le moins de dégâts collatéraux possibles pour tous les acteurs.
Notre planète et sa délicate atmosphère qui l’entoure sont une création magnifique de Dieu.
Pourtant, notre environnement est en dessous dessus si on en croit le réchauffement de la planète qui, sans plan d’action, s’accélère tout comme son air et son eau deviennent de plus en plus pollués. Une bonne gestion de nos ressources est une question liée à la religion et la morale. La protection de nos ressources énergétiques et moins de dépendance sur nos énergies fossiles sont des engagements qui pourraient sauver notre avenir, du renouvellement de nos habitudes de vie jusqu’à la rédemption de notre politique étrangère.
Une culture qui fait la promotion de familles saines est nécessaire à l’éducation de nos enfants qui doit comporter des valeurs sûres, et la rupture dans nos familles et nos communautés doit nous faire réfléchir. Mais nous avons besoin de solutions mûrement réfléchies et non de la politique du bouc émissaire. Ne serait-il pas plus sage de se rencontrer pour trouver un terrain d’entente et réduire d’une façon significative le nombre d’avortement, plutôt que de s’en servir, à droite comme à gauche, pour accuser l’autre et se déchirer ?
Nous avons besoin d’une politique nouvelle, inspirée par nos valeurs les plus élevées. Nous devons réveiller le meilleur dans le cœur de chaque Américain et nous unir pour résoudre certaines questions éthiques des temps modernes.
Les Américains sont bien moins concernés par ce qui est libéral ou conservateur, Démocrate ou Républicain. Nous sommes plutôt préoccupés par ce qui est juste et efficace.
Il est grand temps d’abandonner la division partisane pour s’occuper des causes humanitaires et de la justice sociale qui offriront alors un nouveau visage à l’Amérique. Construire cette nouvelle Amérique exigera une plus grande éthique de nos dirigeants Démocrates et Républicains, tout comme de chacun d’entre nous.
Mon nom est Jim Wallis. Merci et que Dieu vous bénisse.
texte et version audio à retrouver en anglais sur le site de SOJOURNERS: www.sojo.net/