A qui veut découvrir ou se plonger dans la fantasy ou la science fiction chrétienne, un site **Voir le site ** fort documenté offre un accès direct et plaisant aux œuvres de ce genre. Cette belle et surprenante réalisation a donné envie à Témoins d’en savoir plus sur son auteur qui fait vivre ce blog sous le pseudo de foretdulac (traduction littérale française de son nom) et ce dernier a accepté de lui accorder une petite interview.
Témoins : Bonjour, Témoins est heureux de vous rencontrer. Vous venez de créer, à l’adresse des internautes passionnés de science fiction, un site original où sont répertoriées et présentées les auteurs de sensibilité chrétienne. Vous y analysez leurs œuvres. Votre site est déjà bien documenté et d’une teneur quasi professionnelle ! Comment vous est venu ce goût pour la science fiction en général ? Quel est le premier texte qui vous a « accroché » ?
Foretdulac : Cela remonte maintenant à bien loin, mais c’est sans doute par Jules Verne, puis par H.G. Wells (« L’homme invisible », « L’île du docteur Moreau » …) que je suis arrivé à la science-fiction et à la fantasy. L’auteur qui, à cette époque, m’a le plus accroché est Isaac Asimov avec ses séries sur les robots ou le cycle « Fondation » et si, dans le fond, des auteurs posant des questions plus existentielles me faisaient davantage rêver, j’ai souvent été déçu parce que, dans un monde sans Dieu et sans surnaturel, le dénouement n’osait pas souvent nous amener dans le rêve et l’impossible.
Témoins : Que vous apporte l’univers de la science fiction ? Selon les auteurs cet apport, quand il existe, doit-être fort différent je suppose ?
Foretdulac : Je ne suis pas fondamentalement un littéraire. Je n’ai jamais vraiment accroché avec la littérature classique sauf des livres comme « Le Comte de Monte-Cristo ». J’aimais beaucoup aussi les romans policiers (Agatha Christie, S.A. Steeman, par exemple). Ce que je trouve dans la science fiction c’est qu’elle ouvre des perspectives au-delà de la vie prosaïque et quotidienne et d’un monde purement matériel.
Témoins : Comment vous est venue l’idée de créer le site « fictionchretienne.wordpress.com » qui requiert d’être un grand lecteur ? Dans quel but l’avez-vous conçu ?
Foretdulac : A la fin de mon adolescence j’ai lu le « Seigneur des Anneaux » sans savoir à l’époque que l’auteur était chrétien. Ce livre m’a procuré un plaisir extraordinaire tant l’histoire était riche, forte, hors du commun …
La raison principale de mon site est que ce que des auteurs comme Tolkien ou Lewis ont dit de diverses manières, et que je viens de relire dans « Merlin » de Stephen R. Lawhead, reste profondément vrai : « Peut-être la vérité nous touche-t-elle plus aisément par le biais du cœur (que de la raison), or les contes et les chansons sont le langage du cœur ».
J’ajoute à cela qu’après ma conversion je fus un grand lecteur de livres de piété, de théologie. J’ai lu « Tactique du Diable » de C.S. Lewis et découvert ensuite ses livres de fiction pour enfants : « Le monde de Narnia » ** Voir article sur ce site **, et pour adultes : « La Trilogie de l’espace ». Certains étaient publiés en français, par des éditions séculières, mais ils restaient, à cette époque (années 80), complètement inconnus du public chrétiens car on ne les trouvait dans aucune librairie chrétienne. Or, j’aimais beaucoup ces romans au point de lire en anglais ceux qui n’étaient pas traduits en français. S’il est bien sûr facile de saisir dans « Narnia » l’arrière-plan chrétien, en lisant son livre « Surpris par la Joie » j’ai découvert, plus que je ne le pensais, combien les valeurs de C.S. Lewis étaient présentes dans ses histoires. A l’inverse « Les Royaumes du Nord » de Philipp Pullman est une œuvre riche en imagination mais qui diffuse une vision négative du christianisme. J’ai alors réalisé combien les convictions des écrivains de fantasy imprégnaient leurs œuvres. Étant un brin obsessionnel j’ai donc poursuivi mes recherches et découvert qu’il existait bien d’autres romanciers chrétiens et je me suis alors dit que d’autres personnes, notamment d’autres jeunes comme moi à l’époque, aimeraient sûrement lire des romans de fantasy ou de science-fiction chrétiennes mais que, hélas, ils ignoraient que cela existait, les librairies chrétiennes ne diffusant quasiment que des livres, en tout cas pour les romans, publiés par des éditions chrétiennes. On est un peu plus au fait des groupes musicaux ou des chanteurs de rock, mais très peu des écrivains.
Témoins : Vous n’auriez pas imaginé ce site si vous n’étiez à la fois passionné par ce genre de littérature et … chrétien ! Pourriez-vous nous dire quelques mots sur votre parcours spirituel ?
Foretdulac : J’ai toujours été pieux, même si je ne peux pas dire que ma famille était chrétienne. Après ma confirmation (dans une église luthérienne), j’ai essayé de rester sur les bancs de l’Eglise mais, seul jeune à le faire, une fois les cadeaux reçus, après un an, j’ai cessé de fréquenter l’Eglise. Vers 17 ans je me suis posé cette question sur Dieu : s’il existe, ce ne doit pas être le choix des autres qui me conditionne à le croire mais bien la rencontre de son existence. J’ai donc commencé à prier « Seigneur, si tu existes, révèle-toi à moi ». Ma prière a duré quelques mois. Entre temps j’ai rencontré des jeunes chrétiens, j’ai fait un camp de jeunes et à l’automne 1983 je me suis converti. Aujourd’hui je suis pasteur et détaché sur deux mi-temps sociaux et humanitaires. Ne voulant pas mêler mes employeurs à mes élucubrations, j’ai préféré utiliser un pseudo (transparent pour ceux qui me connaissent) pour faire vivre mon blog : foretdulac.
Témoins : Percevez-vous, dans le contexte actuel de crises (économique, écologique, spirituelle etc) et de globalisation, une évolution dans les thèmes de la science fiction du XXIième siècle ?
Foretdulac : Concernant les livres chrétiens, « Tobie Lolness » par exemple, écrit par un français, Timothée de Fombelle, est le livre qui m’a le plus marqué ces deux dernières années. Il aborde en arrière-plan les questions écologiques et l’intolérance. « Auralia’s Colors » de Jeffrey OverStreet aborde aussi la question de la différence et se situe dans un mélange de cultures fruit de notre monde globalisé, alors que les livres d’Asimov par exemple, étaient très occidentaux.
Dans les livres de science-fiction d’auteurs non-chrétiens on est souvent dans des mondes plus sombres, décadents, avec une technologie très prégnante ou alors dans quelque chose de post-apocalyptique où la lumière ne perce que peu au milieu de la misère. On est aussi très loin du manichéisme : le « héro » est parfois très trouble et ses actes peu recommandables.
Ces œuvres reflètent clairement ce qu’on peut espérer dans un monde sans Dieu. Je dirai que si Timothée de Fombelle peut décrire un monde dur où malgré tout une espérance et une beauté peuvent transpercer, c’est parce que la foi permet de regarder au-delà de ce que le monde nous présente actuellement.
Témoins : Merci.
Propos recueillis par Françoise Rontard