En provenance d’une culture où régnait la séparation et le compartimentage, nous découvrons aujourd’hui l’interconnexion et l’unité. Sur le plan religieux, on se focalise plus sur des lieux où se manifesterait une obsession et une manipulation du sacré. Comme le fait remarquer Richard Rohr : « Dans une religion mûre, le séculier devient sacré. Il n’y a plus deux mondes. Nous devons quitter le monde séculier pour trouver le monde sacré, car ils se rejoignent. C’est la signification du voile du temple qui s’est déchiré quand Jésus est mort. Le temple divisait la réalité entre le monde saint à l’intérieur et le monde impie à l’extérieur. C’est pourquoi Jésus dit que le temple doit tomber ; « Pas une pierre ne restera sur une autre » (Marc 13.1-2) ». Notre mot profane vient du latin « pro » et « fanum » qui signifie : « en dehors du temple ».
Le théologien jésuite, Teilhard de Chardin va dans le même sens : « En vertu de la création, et, encore plus, de l’incarnation, rien ici-bas n’est profane pour ceux qui savent voir ». Selon Richard Rohr, « il y a seulement un monde et c’est le monde surnaturel. Il n’y a pas un monde naturel dans lequel Dieu n’est pas » (1)
Une réalité sacrée
Cependant, comme le rappelle Richard Rohr, nous avons pu dans le passé, penser en termes dualistes dans les catégories du bien ou du mal, du naturel ou du surnaturel, du profane ou du sacré. Jésus a surmonté cette distinction absolue « en mettant ensemble le sacré et le profane ». « Il a uni ensemble en lui-même le matériel et le spirituel, le divin et l’humain. Il rassemble les deux en même temps. Quand nous avons rencontré le mystère du Christ, nous savons qu’il y a seulement Une Réalité. Nous ne pouvons plus diviser le monde entre naturel et surnaturel ou entre sacré et profane. Il est entièrement surnaturel et sacré ». Et cet état remonte loin. « Le sacré est établi depuis le tout premier commencement de la création et il est universel ».
Richard Rohr nous renvoie à des références bibliques en ce sens. Ainsi Dieu a fait l’homme à son image et selon sa ressemblance (Ge 1.26). L’apôtre Pierre comprend finalement qu’il ne doit appeler personne profane ou impur (Actes 10.28). Paul envisage la réalité du monde en ces termes : « Les perfections invisibles de Dieu, sa puissance éternelle, et sa divinité, se voient comme à l’œil, depuis la création du monde, quand on les considère dans ses ouvrages » (Rom 1.20).
« Nous vivons dans un univers enchanté. Avant l’incarnation humaine en Jésus, il y a eu la première incarnation originale à travers la lumière, l’eau, la terre, le soleil, la lune, les étoiles, les plantes, les arbres, les fruits, les oiseaux, les serpents, le bétail, les poissons et « chaque espèce de bête sauvage », suivant la Genèse (1.3-25) ».
« Le théologien franciscain Saint Bonaventure se fondant sur l’incarnation de Jésus et l’amour de François pour toute la nature voyait des traces et des empreintes de Dieu, en toutes choses. Le monde entier est « l’incarnation » du mystère de Dieu et effectivement « le Corps de Dieu » (voir Romains 8.19-23)… ».
Nous trouvons un sens pour notre vie dans cette vision : « Le voyage de l’âme en Dieu, comme Bonaventure l’énonçait, était de voir l’unité de tous les êtres, comment chercher ce Dieu partiellement caché, et d’honorer ces traces partout où on les voyait. C’était se rendre à la gratitude et à une immense confiance, celle de faire partie de quelque chose de très bon. Le résultat, c’est une vie continuellement en appréciation, en révérence, en sobriété et dans une joie simple, tout en vivant une vie très utile dans le monde » (2).
Une autre manière de voir le monde
Voici une autre manière de voir le monde qui débouche sur une autre manière de vivre .
Parfois même, cette vision se traduit dans une expérience. Ainsi, cette séquence présente également un témoignage Un jour, marchant de long en large en lisant les psaumes, James Finley commença à entrevoir la présence divine dans l’air qu’il respirait. « En mon être intérieur, je sentais que je marchais dans la présence atmosphérique, englobante de Dieu qui me soutenait, souffle après souffle ». En ce moment d’éveil, James Finley avait également conscience que Dieu, qui soutenait sa vie souffle après souffle, le connaissait intimement en grâce, en bonté et en miséricorde (3).
Brian McLaren approche cette réalité dans sa dimension collective. Dans la menace qui pèse sur notre planète belle et fragile, « si nous n’apprenons pas à tout re-consacrer en saint et spirituel, tout sera profané. Réengageons à la fois le religieux et le séculier dans une dynamique créative qui mérite et inspire la révérence appropriée » (4).
Rapporté par Jean Hassenforder à partir de la séquence : « One reality » 11-17 juin 2023 publiée sur le site du « Center for action and contemplation »
- https://cac.org/daily-meditations/reconsecrating-our-lives-2023-06-16/
- https://cac.org/daily-meditations/sacred-reality-2023-06-11/
- https://cac.org/daily-meditations/sustained-breath-by-breath-2023-06-14/
- https://cac.org/daily-meditations/reconsecrating-our-lives-2023-06-16/