Une question et une interpellation d’Antoine Nouis

Théologien, bibliste, directeur de Réforme, le grand hebdomadaire du protestantisme, Antoine Nouis a une voix qui porte. Or, il pose aujourd’hui une question dérangeante : le protestantisme luthéro-réformé va-t-il disparaitre ? Son interrogation se fonde sur la récente enquête de l’Ifop sur les protestants en France à la suite de la précédente en 2010.

A l’intérieur du protestantisme, la proportion des luthéro-réformés a diminué. Elle est passé de 56% à 48%. Ainsi, nous dit Antoine Nouis, ils ont perdu 10 points en quatorze ans. Si le nombre des protestants parait stable et peut être évalué à 1 300 000, c’est une perte de 10%, c’est 130 000 personnes ; Environ 9000 personnes par an. ‘C’est colossal !’ « Si jamais ces chiffres se poursuivent, dans cinquante ans, il n’y a plus de luthéro-réformés ». Ces résultats ne surprennent pas Antoine Nouis. « Cette perte de substance, tout le monde peut le constater. Par rapport à il y a vingt ans, ce que j’entends, c’est une perte de dynamisme, de force vive… Il y a de moins en moins d’enfants dans les églises, ce qui est inquiétant pour les églises réformées où la transmission se fait surtout par le canal des familles… A l’âge de 70 ans, quand je m’adresse aux gens de ma génération et quand je leur parle de leurs enfants et de leurs petits-enfants, beaucoup se désolent de leur absence à l’église. « Il y a vraiment une perte très forte. Alors, qu’est-ce qu’on fait ? Ou bien, on laisse aller. Ou bien, on considère qu’il y a dans le courant luthéro-réformé des richesses humaines, des richesses spirituelles qui méritent d’être maintenues. Dans ce cas, il faut tout mettre à plat : la situation des églises, la structure financière, la formation des pasteurs, la prédication etc. » Dans Réforme, Antoine Nouis a posé la question : Qu’est-ce qu’on peut faire par rapport à cette situation-là ? Comment mobiliser toutes les imaginations ? Car, Antoine Nouis en est convaincu, ces églises « portent un message spirituel, un message théologique qui nous apporte une compréhension de l’Évangile d’une grande richesse ».

Commentaire : L’interpellation d’Antoine Nouis vis-à-vis de son Église manifeste une capacité de constater les réalités et le courage d’y faire face. Au cours de ces trois dernières décennies, on a pu observer la manifestation et le développement d’un manque de pertinence dans les Eglises occidentales. Un écart s’est creusé entre un fonctionnement peu mobile des églises et les aspirations nouvelles des populations. Au long de ces années, Témoins a dressé ce constat, a cherché à analyser la situation à partir des sciences sociales et à recenser les initiatives et les innovations engagées pour remédier au manque de pertinence. Dans cette conjoncture, on peut noter tout particulièrement les livres de Michaël Moynagh au début du XXIe siècle : ‘Changing World Changing Church’ : https://www.temoins.com/a-monde-qui-change-eglise-qui-change/

On peut porter au crédit de l’Église anglicane d’avoir su reconnaitre le besoin de pratiques alternatives en favorisant le développement de « Fresh expressions ». Le mouvement de l’Eglise émergente a manifesté le même désir d’ouverture et de pertinence. Gabriel Monet a écrit une thèse à ce sujet : « L’Église émergente. Être et faire Église en post-chrétienté » : https://www.temoins.com/des-outres-neuves-pour-le-vin-nouveau-interview-de-gabriel-monet-auteur-de-leglise-emergente-etre-et-faire-eglise-en-postchretiente/ Au long de ces années, la sociologie a éclairé la situation, et donc un chemin potentiel. Nous nous sommes beaucoup référé aux travaux de Danièle Hervieu-Léger : « L’autonomie croyante. Questions pour les Églises » : https://www.temoins.com/jean-hassenforder-lautonomie-croyante-questions-pour-les-eglises/

Cependant, on doit constater que ces recherches ont souvent été méconnues, se heurtant à l’immobilisme des appareils ecclésiastiques. En ce qui concerne le catholicisme en France, le manque de réactivité a évidemment largement contribué à la chute relatée dans le livre : ‘La France des valeurs. Quarante ans d’évolutions’. En quarante ans, depuis 1990, « La population se déclarant catholique est passée de 70% à 32% » https://www.temoins.com/comment-le-paysage-religieux-en-france-a-completement-change-en-quarante-ans/

Il y a donc une manière d’envisager l’avenir d’une Église dans une approche prospective. Antoine Nouis pourra s’en inspirer. Pour notre part, nous gardons mémoire du livre de Laurent Schlumberger,A l’Église qui vient’. Ainsi écrivait-il : « Il s’agit pour notre protestantisme de passer de la connivence au partage, de l’entre-deux à la rencontre, d’une Église qui se serre les coudes à une Église qui ouvre les bras, d’une Église de membres à une Église de témoins » : https://www.temoins.com/a-leglise-qui-vient/. Tout récemment, nous avons pu présenter le livre de Fritz Lienhard sur ‘l’avenir des Églises protestantes’ y appréciant notamment sa mise en évidence du développement d’une nouvelle dimension spirituelle dans la société et, en regard, l’appel à une théologie de l’Esprit. https://www.temoins.com/dans-le-contexte-dune-nouvelle-culture-quel-avenir-pour-les-eglises-protestantes/

Nous souhaitons une pleine vigueur à la mobilisation des esprits à laquelle fait appel Antoine Nouis. On sait les vertus de l’intelligence collective d’autant qu’elle sera là animée par l’Esprit Saint.

J H

Le protestantisme luthéro-réformé va-t-il disparaitre ?

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