Une esthétique primitive.
Aucun souci écologique ou art du paysage pour ces artistes mais une esthétique primitive par tout un jeu de références que les artistes du Land Art ont très explicitement puisées dans les réalisations des civilisations disparues, les hommes de bronze de Stonehenge et de Carnac, les égyptiens de Gizeh et de Saqqarah, les Mayas de Chitchen Itza et de Uaxactum, mais aussi les concepteurs des énigmatiques figures gravées dans le sol anglais et dans le désert de Nazca, au Pérou. A tel point que les réalisations sont considérées comme médiatrices entre l’œuvre, le site et la cosmogonie.
Comme un juste retour des choses après l’expérience moderne, un besoin de relier la terre au ciel. Nancy Holt aligne des tubes de béton avec la position du soleil aux solstices (Sun tunnels 1973-76), Walter de Maria plante des mats d’acier pour attirer la foudre (Lithning field 1977), Dennis Oppenheim fait réaliser par un avion un vortex de fumée (Whirpool-Eye of the storm 1973) et Robert Smithson réalise une immense spirale en roche sur les berges d’un lac (Spiral Jetty 1970).
Si la démarche américaine a été un déplacement de concepts (minimalisme et conceptualisme) d’un contexte urbain dans un contexte naturel, la démarche des européens est surtout un travail avec la nature et se présente comme un prolongement d’un art paysager. Pour eux il s’agit non pas de se confronter à la nature mais bien plus de l’arranger et parfois très religieusement. Le terme d’Earth Works (en référence à leurs grands travaux) définit bien la démarche américaine, le terme de Land Art (une attitude devant le paysage) caractérise celle des européens. Chez eux un même souci esthétique issu d’une longue tradition. Leur travail est également caractérisé par la douceur et un respect de l’environnement. Hamish Fulton rapporte des photos de paysage en noir et blanc sans intervention sur celui-ci (A view from the west coast of Arran across Kilbranan Sound 1978), Richard Long réalise, pendant ses marche, des cercles et des alignements discrets de pierres (COTOPAXI CIRCLE 6 A 12 DAY WALK IN ECUADOR 1998), Andy Goldsworthy construit des murets ou assemble des tiges de fougères, Wolfgang Laib étale avec application et mysthicisme du pollen qu’il a patiemment récolté. Les actes de ces artistes dont l’atelier est le monde sont régulièrement empreints de religion naturelle, de syncrétisme, de référence aux forces cosmiques, primitives, aux énergies vitales.