La revue “Christ seul” (1) vient de présenter les résultats d’une enquête sur les églises mennonites en France, en s’ouvrant à la réflexion d’un sociologue bien connu des lecteurs de Témoins: Frédéric de Coninck, lui-même membre de cette dénomination.
“Il n’était pas naturellement facile de se laisser regarder par un regard inhabituel”, nous dit Frédéric de Coninck.
“Le sociologue regarde ce qui se passe” et sa vision peut ne pas correspondre aux représentations courantes en termes spirituels. “Mais à partir du moment ou on est prêt à voir la manière dont le spirituel s’incarne dans les pratiques, on va pouvoir voir comment ces pratiques correspondent effectivement à des choix spirituels“ ..Ainsi “dans un deuxième temps, on peut établir un lien entre une analyse sociologique et une analyse chrétienne”.
“Au cours du temps, on répète des choses. On les modifie même sans s’en rendre compte. Avec un regard distancié, il va être possible de questionner les choix implicites”.
Par ailleurs, des réalités nouvelles dont on n’avait pas conscience vont apparaître. “Cette enquête”, nous dit Frédéric, “a permis de prendre conscience de l’importance accordée par les participants à la prise en charge des problèmes de l’individu”. Jusque là, la réalité était peu perçue au niveau du discours de l’Église.
De même, en montrant que les nouveaux baptisés ne portaient plus en majorité les noms courants dans les familles de tradition mennonite, les auteurs de l’enquête ont fait ressortir une tendance qui va dans le sens de la “sortie d’une identité définie en terme familial”.
Voilà donc une initiative fructueuse. Elle intervient dans un terrain relativement prédisposé, car au cours de l’histoire, rappelle Frédéric, “les églises mennonites ont toujours concentré leur regard sur leur fonctionnement communautaire”.
D’autres églises ont des traditions différentes. Mais aujourd’hui, ce processus d’enquête est une démarche moderne qui s’inscrit dans la culture d’aujourd’hui.
Ainsi, “faire ce type d’analyse, c’est aussi une manière de dialoguer avec la société autour de nous en montrant comment nous vivons ensemble et qu’est-ce que cela apporte. Il y a là une dimension missiologique c’est-à-dire une requête pour une action missionnaire. Le monde autour de nous a appris à s’observer et il parle le langage correspondant. Il nous faut être capable d’entrer dans ce langage comme dans tous les langages qui nous environnent aujourd’hui”.
Frédéric de Coninck distingue deux approches en sociologie: une approche “objectiviste” et une approche “compréhensive”.
Il y a une affinité entre cette dernière approche et la démarche chrétienne.
“La perspective est de comprendre pourquoi les gens font ce qu’ils font. Mes livres (2) sont écrits dans cet esprit”.
Propos recueillis auprès de Frédéric de Coninck
(1) “Christ Seul” : mensuel des églises mennonites de France, 3 route de Grand Charmard, 25200, Montbéliard. Tél.: 03.81.94.59.14 Email : editions.mennonites@wanadoo.fr. Les églises mennonites sont des églises chrétiennes nées au 16ème siècle et s’inscrivant dans ce que l’on appelle la Réforme radicale.
(2) Entre autres :
La Justice et l’Abondance,
La Justice et la Puissance,
La Justice et la Connaissance, parus aux éditions La Clairière.
Références: Témoins, n°130, juillet août 2000