Il y a là une dynamique qui est destinée à aller de l’avant et à s’étendre au-delà de la communauté chrétienne. Paul voit l’action de Jésus sur la société globale. « Il décrit une œuvre justificatrice de Jésus qui s’étend sur tous les hommes croyants ou non… » La grâce de Dieu, accordée en Jésus Christ « se répand en abondance sur la multitude (Romains 5.15). « Les logiques de vie portées par la grâce gagnent du terrain » (p. 69). « La loi essaye de limiter l’œuvre de mort, mais seuls des actes de don, de pardon, de dépassement des conflits donnent réellement la vie. Ce sont là les actes créateurs qui inaugurent la nouvelle humanité structurée par le pardon » (p. 72)
Paul dessine par ailleurs un projet commun pour l’Eglise et les autorités civiles : promouvoir le bien. « Le but premier de la loi et de l’autorité civile est un but positif : promouvoir le bien, construire de la vie sociale. Là, la loi fait oeuvre de grâce : elle ouvre des voies. Elle propose un bien à accomplir. Elle encourage le bien. Ce n’est qu’en deuxième rideau que la loi est répressive. Les chrétiens pour leur part doivent abonder cette promotion du bien. Ce qui donne l’impulsion à la société globale pour aller de l’avant est ce bien pratiqué et pas la pratique répressive qui construit un équilibre, mais ne fait pas aller de l’avant (p. 74)
La société de l’époque était marquée par l’emprise des hiérarchies sociales liées à la naissance. Or, Paul proclame l’égalité en valeur entre les juifs chrétiens et les païens chrétiens. « Dans l’Eglise sont ainsi abolies toutes hiérarchies construites socialement. Dans les sociétés anciennes où le statut social s’héritait largement par les naissances, où la mobilité sociale était fort réduite, parler d’une élection qui ne passe pas par la naissance est révolutionnaire. Cela veut dire qu’on peut légitimement participer à un groupe social d’une valeur éminente, un groupe choisi par Dieu, sans être d’une valeur éminente par sa naissance. La critique de la société d’ordre qui aboutira à la fin du XVIIIe siècle est ici en germe. C’est si vrai que ce qui vaut ici pour juifs et grecs sera repris plus globalement par Paul dans d’autres épîtres à propos d’autres différences sociales… ».