Ce livre sur la justice et le pardon s’ouvre par un certain nombre d’exemples qui montrent combien le pardon dans la vie sociale peut être une impérieuse nécessité. Mais en même temps, à partir d’autres exemples, Frédéric de Coninck nous indique que cette pratique n’est pas hors de portée. Les chrétiens ont joué un rôle important dans certains cas comme la réussite de la sortie de l’apartheid en Afrique du Sud ou la réconciliation franco-allemande après la seconde guerre mondiale.
L’Epître aux Romains : une vision nouvelle
Pour fonder son propos sur les pratiques de pardon dans la vie sociale, à l’échelle des cultures, des classes, des nations, Frédéric de Coninck a choisi de s’appuyer sur une analyse en profondeur de l’Epître aux Romains. Si cette épître a été étudiée le plus souvent jusqu’à présent en théologie systématique, elle est abordée ici comme « un texte existentiel qui cherche à rendre compte des différentes facettes de l’expérience humaine avec la plus grande finesse possible » (p. 30). Frédéric de Coninck nous propose une approche tout à fait originale qui fait apparaître la vision d’une dynamique nouvelle. L’Epître aux Romains apparaît comme « la charte d’une nouvelle humanité structurée par le pardon, d’une humanité qui reconstruit des liens sociaux détruits, qui élabore de nouvelles formes pour vivre ensemble » (p. 25)
« L’humanité nouvelle dont nous prétendons voir la charte dans l’Epître aux Romains, part de l’Eglise. Dans l’Eglise, nous devons reconnaître que chacun commet des péchés et compter sur Dieu qui nous pardonne. Le premier pas de l’humanité structurée par le pardon est de se reconnaître alors comme égal en valeur par rapport à l’autre. Le deuxième pas de cette humanité est d’affiner, chacun pour sa part, la compréhension qu’il a de la fidélité à Dieu en respectant les convictions éventuellement différentes de son frère. Nous devons admettre des différences culturelles, des histoires différentes, des manières de faire différentes, tout en nous reconnaissant membres d’une même Eglise » (p. 39)
« L’appel de Paul à ne pas juger, sa critique violente de ceux qui veulent se grandir, son insistance sur le fait qu’aucun groupe social ne peut se prétendre meilleur que les autres, renvoient à ce projet : la construction d’une communauté d’édification mutuelle vivant en paix. Il n’y a pas de paix possible, pas de pardon entre groupes envisageable, sans cette égalité de principe à la base ». Un deuxième point fort est « qu’au-delà des particularités rituelles et culturelles des uns et des autres, il y a un fond commun à l’ensemble de l’humanité, un appel que Dieu adresse à tout homme : mettre en œuvre la justice et la paix » (p. 46).