L’année 2000 a été marquée par une campagne internationale pour l’annulation de la dette des pays pauvres très endettés (1). De nombreuses associations françaises ont participé à cette campagne, entre autres: Agir ici, le Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement (CCFD), le Secours Catholique, le Service d’Entraide et de Liaison (SEL). Patrick Guiborat répond ici à nos questions.
Qui a été à l’origine de cette campagne internationale?
Les problèmes de dette internationale ne datent pas d’aujourd’hui, mais la première fois qu’il a été question d’associer à l’année 2000 une annulation générale de dette pour un groupe important de pays remonte à 1990 lors de la Conférence des Églises de Toute l’Afrique, avec la mention d’un Jubilé biblique. Mais c’est en 1996 que la campagne “Jubilee 2000” est officiellement née en Grande-Bretagne sous l’impulsion de trois ONG chrétiennes.
Comment s’est-elle développée en France?
En France, le S.E.L. s’y est intéressé dès 1997, et a organisé une conférence publique en mars 1998. Courant 1998, d’autres organisations s’y sont intéressé comme le C.C.F.D. qui a été choisi comme coordinateur national en automne 1998 par 16 associations, rejointes ensuite par une quarantaine d’autres dont récemment 3 syndicats. La campagne “Les pays pauvres ont déjà trop payé: pour l’an 2000, annulons la dette” a été officiellement lancée en février 1999, et a mobilisé jusqu’en janvier 2001.
Quelles en sont les raisons profondes?
La conviction d’une énorme injustice accumulée avec le temps à l’égard des populations les plus pauvres de la planète et d’un prix à payer hors de toute mesure: des millions de morts qui pourraient être évitées si la spirale de cet endettement était annulée. Dans un premier temps, la solution immédiate d’annuler les dettes insupportables a été évidente, même si la question d’ensemble est bien plus complexe et nécessite aussi d’autres actions pour qu’un tel drame ne se reproduise plus. Pour les organisations chrétiennes, fer de lance de l’initiative, les principes bibliques du Jubilé ont trouvé là une actualisation frappante.
Quels ont été les faits marquants de cette campagne en France?
Une formidable mobilisation matérialisée par la collecte de 550.000 signatures en quelques mois en France. Le nouveau record mondial des pétitions vient d’ailleurs d’être établi avec plus de 24 millions de signatures. Cette mobilisation s’est construite sur un important travail de sensibilisation, ponctué de temps forts comme le G7 de Cologne en juin 1999, les appels du 19 juin pendant 6 mois, la carte de vœux au Premier Ministre, et avec le relais d’une partie de la presse (Témoins aussi!). Il y a eu également une reconnaissance officielle par le gouvernement français et des contacts réguliers avec deux Ministères (Finances et Affaires Étrangères / Coopération).
Quels en sont actuellement les résultats?
Positifs: allégements de dette pour 22 pays pour un total qui avoisinerait les 100 milliards de dollars, du jamais vu!
Négatifs: insuffisant et bien trop lent au regard de l’ampleur du drame, ne résout pas les problèmes de fond (transparence, solution à long terme, rôle des Institutions Financières Internationales, participation des sociétés civiles, etc.); et il est trop tôt pour être certain que les sommes ainsi libérées serviront au meilleur bénéfice des populations les plus démunies.
Comment poursuivre?
La campagne s’inscrit dans la durée: le collectif français va changer de nom en février et affine ses nouveaux objectifs :
· suivi des décisions du G7 de Cologne, et notamment des allégements décidés par la France, en vérifiant que ceux-ci ne grèvent pas le budget A.P.D. (Aide Publique au Développement);
· promotion pour un élargissement des allégements obtenus tant en montant qu’en nombre de pays concernés;
· promotion d’une solution large et durable pour l’ensemble des questions de dette internationale, notamment par la réflexion sur une instance internationale d’arbitrage;
· lien plus étroit avec les campagnes du Sud et leurs préoccupations.
Comme vous le voyez, il y a eu une formidable mobilisation et quelques résultats, mais bien du chemin reste à parcourir. C’est pourquoi les associations continueront à diffuser régulièrement des informations en lien avec une mobilisation annuelle, voire aussi ponctuelle si besoin.
Patrick Guiborat, directeur général du SEL et membre du Comité de pilotage de la campagne “Pour l’an 2000, annulons la dette”.(1)
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