Journées du livre contre la misère
( ATD QUART MONDE – février 2000 )
Ce furent deux après-midi passionnantes que j’ai passées dans des locaux de la cité des sciences de la Villette, à Paris, où, sous l’impulsion du mouvement ATD QUART MONDE, étaient présentés de nombreux ouvrages dans le but de faire connaître et comprendre la grande pauvreté telle qu’on la rencontre en France, aujourd’hui.
Le mouvement ATD QUART MONDE a été créé en 1957 par le père Joseph WRESINKI pour venir en aide à des familles en très grande pauvreté ; ces familles étaient prise comme dans un engrenage de misère de sorte que l’extrême pauvreté et la vie à l’écart de la société se reproduisaient, presque toujours, de génération en génération. Ce sont ces familles oubliées, dans notre pays, que l’on a appelées le quart monde. Le point fort de ce mouvement ouvert à tous est, par l’accès au savoir et à la capacité de s’exprimer, de permettre aux membres de ces familles, de mieux prendre en charge leur destin et ainsi retrouver la dignité souvent bafouée. Depuis les années 80, l’exclusion s’est beaucoup élargi et ce sont vraiment des personnes de toutes classes sociales qui peuvent basculer rapidement dans la grande pauvreté. Ce sont tous ces aspects de l’exclusion qui étaient évoqués dans les livres proposés dans ces journées.
Flaner de table en table et parler souvent avec les auteurs fut très riche. Ce fut l’occasion de rencontrer des personnes vivant parmi les exclus et d’autres se penchant plus spécialement sur la jeunesse et les quartiers difficiles, sur la prise en compte de l’exclusion dans l’enseignement, sur le travail et son évolution… Avec des ouvrages présentant le mouvement ATD Quart Monde et sa réflexion, il y avait aussi une ouverture vers les pays en voie de développement, car là aussi le mouvement s’est implanté, dans ces banlieues surpeuplées et d’une immense misère.
Régulièrement au long de ces journées, des auteurs étaient interrogés sur leur livre et sur leurs expériences ; suivait un temps de questions-réponses. J’ai ressenti vraiment encourageants tous ces combats menés dans leur profession pour les uns, dans des associations (avec le plus souvent un rôle important du bénévolat) pour les autres, pour une société plus équitable, plus solidaire. C’est formidable de voir, face à des situations si désespérantes, l’inventivité que la volonté de solidarité produit pour trouver des solutions.
Jeunes et enfants n’étaient pas oubliés dans ces journées.
De nombreux livres pour enfants étaient exposés ; mais aussi était présentée une exposition de dessins et sculptures réalisés autour du livre “ mon cœur est un caillou ” qui raconte le destin de sept enfants de différentes régions du monde . On peut voir cette exposition à l’ONU, à Genève. Au mois de novembre 1999, a été lancé, à Genève aussi, un APPEL DES ENFANTS, à l’occasion des 10 ans de la Convention relative aux Droits des Enfants. Un des buts de cet appel rédigé par 86 enfants ( venant de 24 pays ) appartenant à TAPORI, la branche enfance d’ATD Quart Monde, est que soient reconnus dans le monde, le droit au “ respect, le droit à la paix, à l’amitié, le droit d’avoir une vie normale ”.
Jeunesse Quart Monde réunit des jeunes qui veulent être actifs dans la lutte contre l’exclusion : à des rencontres qui ont lieu au long de l’année, s’ajoute la possibilité de participer au printemps et en été à des Chantiers-Formation Internationaux.
Parmi les conférences, un temps fort a été celle de Paul BOUCHET, président d’ATD Quart Monde France ; son intervention était centrée sur la loi d’orientation relative à la lutte contre les exclusions. Cette loi, pour laquelle le père Joseph Wrésinski et ATD Quart Monde se sont battus avec ténacité, a été promulguée le 29 juillet 1998. Paul BOUCHET a insisté particulièrement sur quelques points :
– cette loi est une grande avancée pour éradiquer la misère ;
– la loi introduit, dès le début, “ le respect de l’égale dignité de tous les êtres humains ” comme le fondement de la lutte contre les exclusions ;
– c’est une loi globale qui touche à tous les domaines de la vie, droit au travail et à la formation, droit au logement, droit à la protection de la santé, droit à des moyens convenables d’existence, droit à une vie familiale, droit à l’éducation et à la culture et exercice de la citoyenneté ;
– cette loi permet de rompre le cercle vicieux de la pauvreté . Par exemple, pour les jeunes de 18 à 25 ans, est mis en place le dispositif TRACE, parcours personnalisé d’insertion professionnelle, avec un accompagnement renforcé : il est prévu de pouvoir faire plusieurs propositions à un jeune jusqu’à ce qu’il puisse s’engager dans un projet auquel il adhère.
– Cette loi est riche en possibilités, mais il faut la faire vivre. Paul BOUCHET a lancé un appel très fort à la mobilisation de tous, qu’il s’agisse des collectivités territoriales, des institutions sociales, des entreprises et des syndicats, des citoyens. L’engagement des citoyens est important spécialement, au travers des associations, pour écouter les personnes en grande difficulté, leur montrant les possibilités qu’offre la loi contre les exclusions, les épaulant au besoin dans leur démarches auprès des différents organismes.
Voici quelques points de contact, pour s’engager dans ce combat, et trouver les coordonnées du groupe local le plus proche de chez soi :
* ATD Quart Monde , 33 rue Bergère , 75009 PARIS ;
* Fondation Abbé Pierre, Boutiques Solidarité , 53 bd Vincent Auriol , 75013 PARIS ;
* Secours Catholique , à la délégation de chaque diocèse , ou à Secours Catholique,
Secteur des bénévoles, 106 rue du Bac , 75341 PARIS Cedex 07
* Mission évangélique parmi les sans-logis , 22 rue Sainte-Marthe , 75010 PARIS ;
* Armée du Salut , Service Action Bénévole , 60 rue des Frères Flavien , 75020 PARIS ;
( quelques renseignements complémentaires se trouvent sur le site INTERNET de Témoins).
Cette liste n’est pas complète, mais nous projetons, dans de prochains articles, de voir comment s’attaquer à des problèmes plus particuliers liés à l’exclusion, comme l’insertion par le travail et les problèmes de logement ; nous nous pencherons sur d’autres sortes d’action, comme l’engagement local de différentes églises. N’hésitez pas à nous faire partager votre expérience par courrier ou sur le site INTERNET de Témoins.
Les besoins sont considérables ; en tant que chrétiens nous pouvons sûrement apporter une capacité d’écoute particulière . Il ne faut pas craindre de se trouver incompétent car chaque association se charge de former les bénévoles qui désirent s’engager. La Bible nous invite souvent aux œuvres bonnes. Ne craignons pas de nous engager dans le domaine qui nous tient à cœur ; il sera toujours possible de réorienter notre action, s’il le faut, pour mieux la faire cadrer avec notre sensibilité et nos possibilités.