Dans l’œuvre littéraire et cinématographique d’Eric-Emmanuel Schmitt Oscar et la dame rose, madame « Rose » exprime dès le commencement sa réticence à venir quotidiennement à l’hôpital, elle n’aime pas l’odeur, elle n’aime pas l’endroit, et rien qu’en entendant le mot « cancer », elle a l’impression de l’avoir elle aussi ! Le bénévolat n’est pas sa tasse de thé. L’accompagnement d’un enfant cancéreux en fin de vie ne l’est pas davantage. Rien ne prédispose madame Rose à rencontrer Oscar. Rien en elle ne la qualifie pour devenir une visiteuse régulière d’un enfant malade.
Oscar est atteint d’un cancer, il sait qu’il ne lui reste que 12 jours à vivre. Il souffre d’isolement, du silence lâche de ses parents. Il choisit madame Rose pour son franc-parler, pour tout ce qui fait d’elle une personne atypique, inadéquate au discours bienséant du monde hospitalier. Et la rencontre de ces deux êtres va réellement les changer l’un et l’autre. Les sortir de leur isolement respectif. Madame Rose finira par venir quotidiennement rendre visite à Oscar…et sera changée malgré elle. Aller vers la personne malade, isolée, n’est jamais facile. La vulnérabilité de l’être humain que nous sommes nous revient en pleine face, en plein cœur comme un boomerang. L’autre c’est moi. Lorsqu’Oscar sait qu’il va mourir, il renvoie chacun de ses proches à sa propre finitude, et le lecteur, spectateur avec lui. Oui, nous sommes fragiles, et nous sommes mortels ; c’est ce que la maladie porte haut et fort comme message. Mais elle nous apprend par là même à apprivoiser cette part de nous-mêmes que nous refusons d’accepter.
Madame Rose invite Oscar à écrire chaque jour à Dieu, et à lui soumettre un vœu par jour. Après quelque temps, Oscar exprime son désir de découvrir, de rencontrer Dieu. Comment ce Dieu là peut permettre la souffrance et la mort ?…Madame Rose le mène dans la chapelle près de l’hôpital, et le place face au crucifix, Jésus est là sur la croix. Oscar est déçu ! Quoi ! Dieu est cet homme faible, souffrant sur une croix, sur le point de mourir ? Et madame Rose avec pertinence, lui demande s’il aurait préféré un Dieu superman, musclé, loin des préoccupations, et souffrances humaines…Dieu est un Dieu incarné, qui a connu en tout point semblable à nous la condition humaine : la souffrance physique, l’agonie, l’issue fatale : la mort. Dieu lui-même, en Jésus, est passé par le chemin qui nous attend tous ! Fragilité, faiblesse, vulnérabilité est le lot naturel de chacun ici-bas. La présence que nous pouvons nous offrir mutuellement dans les moments les plus sombres de la maladie est l’une des choses les plus simples et les plus importantes. A l’instar de madame Rose nous seront peut-être appelés à accompagner, à visiter des personnes qui nous mettrons face à cette réalité que nous préférerions fuir, mais c’est justement la réalité qui nous ramène à l’essentiel. Peut-être qu’à l’instar d’Oscar, nous serons visités, dans un moment de souffrance, et qu’au travers de la rencontre, et de la maladie, notre présence enrichira l’autre…l’interrogera…le fera grandir, à son insu !
Laetitia Chamard
Notes.
** Lire aussi sur ce site ** l’analyse du livre ” Si je n’ai pas l’amour ” de l’auteur.
Oscar et la dame rose : Eric-Emmanuel Schmitt : Albin Michel : octobre 2002 . En résumé : Voici les lettres adressées à Dieu par un enfant de dix ans.
Oscar et la Dame rose est un film franco-belgo-canadien, réalisé par Éric-Emmanuel Schmitt, auteur du roman du même nom, sorti le 9 décembre 2009, et disponible en DVD depuis 2010.